Conteneur de paillettes d'embryons congelés dans l'azote liquide

Deux projets pour développer l’utilisation des analogues des kisspeptines en reproduction animale

Deux projets pour développer l’utilisation des analogues des kisspeptines en reproduction animale

Publié par Jacques Le Rouzic le 14/01/2016

L’insémination artificielle est largement utilisée dans les élevages laitiers et dans une moindre mesure, dans les élevages allaitants. Cependant, cette technique, qui permet de maitriser la reproduction dans les élevages,  repose sur l’utilisation d’hormones pour stimuler l’ovulation (hormones d’origine animale, comme l’equine Chorionic Gonadotropine ou eCG, et des hormones stéroïdiennes de synthèse). Ces hormones présentent des inconvénients pour les éleveurs (efficacité suboptimale, développement de résistance aux traitements hormonaux chez les animaux, risques sanitaires liés à l’utilisation d’hormones d’origine animale), pour les consommateurs (présence de résidus dans les produits animaux) et pour l’environnement (libération d’hormones dans l’environnement).

Depuis plusieurs années déjà, les chercheurs de l’unité mixte de recherche Physiologie de la Reproduction et des Comportements (PRC) travaillent au développement de substituts de ces hormones stéroïdiennes et explorent notamment la voie des kisspeptines. Les kisspeptines sont des neurotransmetteurs de nature peptidique qui ont un rôle central dans la stimulation de la reproduction. Dans le contexte très compétitif de la recherche internationale, l’équipe de l’INRA a été une des pionnières pour démontrer ce rôle. Naturellement présents dans le cerveau, ces peptides activent la sécrétion de LH1 et FSH2 via la libération de GnRH3 mais leur instabilité métabolique empêche leur utilisation dans les élevages.

Lors d’un premier projet financé par la Région Centre (Reprokiss), les chercheurs de la PRC ont développé avec des chimistes du CNRS des analogues de la kisspeptine qui présentent une durée d’action beaucoup plus longue que la molécule naturelle (plusieurs heures contre quelques minutes) et qui sont actifs à des doses extrêmement faibles (de l’ordre de la dizaine de microgramme pour une brebis). De plus, ces analogues se dégradent en sous-unités (principalement des acides aminés) sans danger pour l’homme ou l’environnement, et pouvant de surcroît être excrétées ou réutilisées par l’animal. Cette première génération d’analogues a fait preuve de son efficacité chez la brebis. Ces résultats ont donné lieu à un premier dépôt de brevet (EP2014051886).
Les chercheurs de l’Institut, en collaboration avec des chercheurs du CBM (UPR 4301 CNRS - Université d’Orléans), de l’ICOA (UMR 7311 CNRS - Université d’Orléans) et de la société Repropharm vont poursuivre leurs recherches sur ces analogues dans le cadre de deux nouveaux projets:

      * Le projet Capriss, financé par la région Centre – Val de Loire à hauteur de 200k€ sur une durée de trois ans, va étudier l’effet d’un analogue de la kisspeptine chez les caprins. Il devra faire la preuve de concept de l’efficacité de cet analogue à déclencher une ovulation en période d’anœstrus après une seule injection. En parallèle aux études chez l’animal, les molécules de première génération seront optimisées dans une optique d’utilisation sur le terrain dans les élevages. Le cout de production de ces molécules devrait être tout à fait compétitifs comparés aux traitements hormonaux actuels, son efficacité devrait être supérieure.

     * Le projet Kiss, financé par l’ANR à hauteur de 600k€ sur une durée de quatre ans vise, d’une part, à mieux comprendre le fonctionnement des récepteurs à kisspeptines (localisation, études pharmacologique pour comprendre leur fonctionnement à un niveau cellulaire et moléculaire…) et d’autre part, à développer une deuxième génération d’analogues encore plus performants, tout en étant innovants du point de vue de l’approche chimique. Ce projet utilisera notamment la modélisation in silico pour cribler les ligands potentiels (molecular docking). Une fois synthétisées, ces structures seront testées in vitro puis in vivo. Au-delà de l’aspect reproduction animale, cible prioritaire du projet Kiss, ces travaux pourraient par ailleurs ouvrir de nouvelles pistes thérapeutiques chez l’homme.

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1 LH : hormone lutéinisante
2 FSH : hormone folliculo-stimulante
3 GnRH : Gonadotropine releasing hormon, hormone de libération des gonadotrophines hypophysaires

Date de modification : 02 août 2023 | Date de création : 06 août 2018 | Rédaction : Jacques Le Rouzic